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Krauss Clemens, (Interprète) Josef Strauss(Compositeur), Karajan Herbert von, (Interprète) Johann Strauss Il(Compositeur), Krips Josef, (Interprète) Johann Fils Strauss(Compositeur), Boehm Karl, (Interprète), Szell George, (Interprète), Kleiber Erich, (Interprète)
Si le four de la création du Beau Danube bleu en février 1867 relève du mythe, il semble tout de même que la pièce (pourtant bissée et louée par la critique) n'obtienne pas immédiatement le succès escompté. La faute aux vers moqueurs que Josef Weyl confie à ces messieurs du Männergesang-Verein, formation commanditaire de l'oeuvre ? Le public a surtout la tête ailleurs. Alors que l'Empire devient " double monarchie ", le moral des Autrichiens est en berne. Quelques semaines plus tard, Paris se montre mieux disposé : la version purement instrumentale fait sensation en mai, puis conquiert le monde dès l'automne. En 1860 déjà, soit à l'époque des Accélérations qui turbinent comme les machines inventées par les apprentis ingénieurs de l'Université de Vienne, la valse vaut une véritable page symphonique. C'est le cas des rafraîchissantes Feuilles du matin, réponse amicale à Offenbach qui présentait ses Feuilles du soir lors de la même réception de l'Association des auteurs et journalistes du 12 janvier 1864, et plus encore des rustiques Légendes de la forêt viennoise (1868), dont l'introduction aux accents de Ländler sonne comme l'écho des contreforts préalpins tout proches. Pas de chance pour Weyl, dont le texte rédigé pour l'hédoniste Aimer, boire et chanter (1869) ne passera pas non plus à la postérité. Mais la création, cette fois, fait un tabac, et certains thèmes seront recylés dans l'opérette pot-pourri Sang viennois. Chemin inverse pour le matériau des voluptueuses Mille et une nuits (1871), tiré d'Indigo et les quarante voleurs (première oeuvre théâtrale du compositeur), et pour celui des nobles Roses du sud (1880), emprunté aux deux premiers actes du Mouchoir de la Reine, qui se déroulent dans le Portugal du xvie siècle. Dépassé par son succès, Johann enrôle ses frères pour tenir - voire augmenter - la cadence. Ingénieur de formation, l'introverti Josef le rejoint en 1853. Quoique toujours dansables, ses oeuvres souvent plus délicates et mélancoliques apparaissent comme de petits bijoux de raffinement orchestral. Le meilleur exemple ? Ses Transactions en apesanteur de 1865. L'optimisme ne lui fait cependant pas défaut : les Délires conçus en 1867 pour le bal des médecins restent joyeux, tandis que l'Opus 263 de 1869 croque la vie à pleines dents, comme les étudiants auxquels il est destiné. Alles Walzer !
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Mozart Wolfgang Amadeus, (Compositeur) Karl Boehm(Chef d'orchestre), Heinrich Hollreiser(Chef d'orchestre), Erich Kleiber(Chef d'orchestre), Joseph Krips(Chef d'orchestre), George Szell(Chef d'orchestre), Lisa Della Casa(Interprète), Hilde Güden(Interprète), Karl Hudez(Interprète), Alfred Poell(Interprète), Harald Proglhof(Interprète), Arpad Sandor(Interprète)
Lisa Della Casa (1919-2012) et Strauss, l'association tient de l'évidence. Aussi retrouviez-vous la chanteuse dans le volume VII de notre Discothèque idéale : elle y est Chrisothemis, la Maréchale et, bien sûr, Arabella - n'y revenons pas. Mais les trésors de legato et d'intelligence, " l'évidente distinction " que louait Jean-Philippe Grosperrin chez ce soprano dont la " pureté n'est ni abstraction ni hédonisme du son " mais implique " une dimension morale, formée de pudeur, de non-dit ", tout cela trouve aussi à s'exprimer idéalement chez Mozart. Della Casa fut l'une des plus grandes Comtesse dans Les Noces de Figaro. Vous l'entendrez ici aux côtés d'Erich Kleiber dans un enregistrement studio dont la qualité restitue bien la richesse du timbre et des inflexions. Merveilles de ligne, de souffle, mais aussi de délicatesse théâtrale dans les récitatifs et le duettino avec Susanna ! Car l'art de la musicienne dépasse le modelé du chant dans les airs : elle sculpte avec le même soin les scènes. Dans Don Giovanni, Della Casa chanta beaucoup Donna Elvira - sous les baguettes, entre autres, de Furtwängler (DVD DG) ou de Mitropoulos (notre Discothèque idéale). Elle fut aussi, plus rarement, Anna. Au live avec Karl Böhm de 1955, en allemand (RCA), nous avons préféré un air gravé en studio l'année suivante : quel tempérament, mais aussi quelle précision dans la vocalise ! Un bijou. Sa maîtrise de la tessiture nous vaut également un " Come scoglio " (extrait de l'intégrale, hélas abrégée, de Böhm pour Decca) d'anthologie, équilibrant la résolution et la fragilité de Fiordiligi. Le poignant air de Pamina, capté lors d'une représentation salzbourgeoise sous la baguette de George Szell, rappelle comme la soprano savait en quelques minutes creuser l'émotion d'un personnage : la voici qui, au fil des mesures, semble s'abîmer progressivement - et nous avec. Dans le lied, Lisa Della Casa nous subjugue par l'harmonie entre naturel et décantation. Chez Schubert, quelle perfection dans le dramatisme et la sensualité de Gretchen am Spinnrade ! Ces reflets du timbre, cette ligne infinie dans Du bist die Ruh vous hanteront durablement. Mais aussi le pur charme dont se pare Der Gärtner de Wolf, pris dans son unique Liederabend salzbourgeois de 1957, le port d'altesse, le mélange de calme et d'inquiétude dans Feld einsamkeit de Brahms, le relief du mot et de la phrase, l'engagement viscéral dans Meine Liebe ist grün. Nous avons glissé en fin de parcours, comme un bonus, l'air " Piangerò " extrait du Giulio Cesare de Handel. Della Casa incarna Cléopâtre à la scène et en grava cinq airs en allemand. Il faut passer outre un orchestre hors sujet - et en pilotage automatique - pour se concentrer sur cette voix au moelleux irrésistible, à la lumière inaltérable, au sens de l'incarnation inébranlable. L'évidence même. (Loïc Chahine)
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